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CLOCHEMERLE ET LA CHÔMEUSE

Dessin de l'acteur Fernandel installée assis jambes en l'air devant le panneau indiquant le village et titre du film "Le chômeur de Clochemerle".
D’après le roman de Gabriel CHEVALLIER
Source image encyclocine.com

CLOCHEMERLE ET SES CANCANS

Comme Fernandel en son temps, le travail, quand il ne l’intéresse pas, elle l’aime à dose homéopathique. Et ça, ça ne leur plait pas aux habitants de Clochemerle ! pas plus que dans le film ! parce que le travail, ça vous permet socialement d’être quelqu’un pardi ! ça vous offre une identité ! Quand on se croise à Clochemerle, on se demande en premier si l’boulot va ! vient ensuite la question de la santé. Bien sûr, elle va si le boulot va ! En fait, même si le travail nous bouffe la vie, l’essentiel c’est d’en avoir pour bouffer. Certains l’ont bien saisi !

Bref, être malade à cause du boulot n’est pas compris. Et surtout pas permis. Du moins, pas trop longtemps, ni trop souvent. Au risque de passer pour un fainéant ! Un « propre à rien » ! Le pire, tomber malade d’un trop de travail ! Alors là, ma foi, les campagnards y perdent leur beau latin dans des messes basses ! « Elle a fait un quoi ? … un beurnat ? Mais qu’est-c’est-qu’swoi ENCORE ? ». Vous le sentez l’air persifflant ? Pour mieux se donner une idée, c’est façon Ariette dans la petite maison dans la prairie. Pour mémoire, Ariette c’est la peau de vache. Derrière suit, le « en v’là ben des manières ! j’t’en foutrais moi du beurnat ! ».

Pour la petite explication, les malades du burn out sont ceux qui prennent le plus leur travail à cœur et donc ceux qui ne comptent pas leurs heures. À se demander ce qu’ils ont à prouver d’ailleurs ! Une sacrée denrée familiale ça encore !

Dans le Beaujolais, la culture c’est la vigne. La terre. On sue pour mériter salaire ! L’héritage pèse encore sur les épaules des générations X, Y et Z. Pas évident de rendre des valises ! Ou plutôt de s’apercevoir qu’elles sont trop lourdes ou que ce qui les remplit est démodé. Car à Clochemerle, tout reste intact. Les vieilles pierres comme les langues de vipères !

Elle, la chômeuse, elle s’en fiche ! Leurs valises, elle n’en veut plus ! D’ailleurs, elle n’est pas chômeuse ! Elle travaille peut-être même plus qu’eux si on commence par redéfinir le travail ! Elle, elle bosse pour sa liberté ! Alors elle s’est réorientée dans une activité moins rentable et moins productrice pour le grand capital. Elle écrit. Beaucoup de conneries sans doute, mais ça la rend heureuse. Qui peut se targuer d’être aussi content qu’elle de se lever à six heures pour travailler et de ne regagner son lit que lorsque les crampes de son cou et des épaules lui brulent la peau ?

Certes, le travail c’est la santé, dit-on ! Et effectivement, l’humain est fait pour travailler. Mais il est aussi, s’il n’est pas complètement névrosé, en quête constante de son bonheur. Alors de ce fait, concilier les deux devrait être un devoir pour soi-même. Somme toute, s’ils choisissaient vraiment leur boulot plutôt que la facilité ou l’obligation de reprendre les vignes du grand-père et du père, ça leur éviterait de se plaindre sans arrêt ces vignerons ! Du temps jamais bon et toujours trop chaud, trop froid, trop tôt, trop vite… Du prix du litre jamais assez cher, disent-ils en claquant la portière du 4X4 devant leur grosse maison bâtie sur l’ancien terrain de vignes constructible à moindres frais ! Pas tous heureusement ! De toute façon, les généralités sont toujours fausses.

Mais bien évidemment qu’on aurait tous à être envieux de ce que les avantages du mode de vie des uns ou des autres offrent ! Puisque même entre eux ils se jalousent ! Elle en sait quelque chose car ses parents le sont vignerons ! Mais elle, la chômeuse de Clochemerle, leurs belles maisons, leurs grosses voitures, leurs vignes et leurs emmerdes, elle leur laisse volontiers ! Probablement parce qu’elle a ce qu’ils n’ont pas. Ce truc indéfinissable qui ni se vend ni s’achète ! Alors qu’on lui foute aussi la paix !

En tout cas, elle, elle les fait jaser ! « Mais comment qu’elle fait pour s’en sortir ? ». Par ailleurs, les réponses sont vite trouvées. Oui puisque chacun y met du sien selon ses propres fantasmes. Pour les uns « c’est les allocs ! », pour les autres « c’est le loto ! ». Ou encore « un héritage ! », peut-être même « Papa ou Maman ! ». Pire « elle se prostitue la nuit dans une grande ville ! » ou « c’est son mec qui racle ! ». Conclusion « Depuis qu’elle a dilapidé l’argent que ses parents ont gagné au loto, les allocs n’en veulent plus ! Alors son mec l’oblige à faire le trottoir ! ».

Et si tel est le cas ?

Et bien si vraiment c’est le cas, l’entraide des petits villages reprendra le dessus. Ainsi va le revers d’une médaille. I love Beaujolais !

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